jeudi 21 juillet 2011

Le plaisir d'écrire


Dans le monde où la communication rapide tient lieu de dogme, le téléphone a tout naturellement conquis la première place. Mais les mots échangés par le câble téléphonique n'ont qu'une vie éphèmère. A peine prononcés, ils sont précipités dans l'oubli, bousculés par leurs congénères proclamant eux aussi leur droit à l'éxistence. Triste sort que celui des paroles volatiles qui ne laisseront rien à la postérité. Heureux statut que celui des mots couchés sur le papier, lus et relus, appelés à conserver notre mémoire. Ecrire, voilà un verbe sujet à compléments.

Il est révolu le temps des moines qui se livraient au dur labeur de la copie. «  Le travail est rude, disait l'un d'eux : il brouille la vue, courbe le dos, écrase le ventre et les côtes, tenaille les reins et laisse tout le corps douloureux ». Encore au XIXème siècle, éducateurs et médecins étudient-ils avec soin la position du corps et du cahier afin d'éviter les déformations osseuses et les risques de myopie. La crampe de la main est une véritable obsession ; en témoignent les dizaines de brevets qui furent déposés pour des appareils destinés à lutter contre cet autre mal du siècle. Pour certains, l'écriture est, au contraire, une source de jouissance corporelle : « Dans l'écriture, dit Roland Barthes, mon corps jouit de tracer, d'inciser rythmiquement une surface vierge... »

Le choix de la plume n'est pas indifférent à l'épistolier. La plume d'oie à longtemps été l'instrument privilégié de l'écrivain. Mais, pour les occasions exceptionnelles, on recommandait l'usage de la plume de paon ou du pélican. Malheureusement, les modestes volatiles n'ont pas fait le poids devant les Sergent-major, bataillon de plumes au caractère d'acier. A leur tour, ces dernières céderont le pas à la bille du stylo.

Au-delà des sensations physiques procurées par le geste de l'écriture, il y a, dans l'acte même, une source de plaisir qu'étendent à l'infini les mille et un évènements heureux qui ponctuent notre existence. La vie, en effet, multiplie les occasions d'écrire. Quoi de plus délicieux que d'annoncer une naissance,un mariage, la réussite à un examen ? A la joie d'écrire une lettre répond le plaisir de sa lecture. En effet, placé sous le signe du partage, le plaisir de l'épistolier se prolonge à l'idée que la bonne nouvelle provoquera une joie intense chez son destinataire.

Rien ne remplace la force des mots et rien n'est plus simple que d'envoyer ses félicitations, ses voeux, souhaiter une bonne fête ou un joyeux anniversaire. Veut-on déclarer sa flamme à l'être aimé dans le silence ? Prendre la plume est le moyen le plus sûr pour y parvenir. La lettre affranchit de la timidité : l'amoureux transi dévoilera plus facilement ses sentiments par la médiation du facteur que devant sa belle. C'est une partie de soi-même que l'on met à l'intérieur de la lettre. Combien de jeunes gens n'ont-ils pas gardé sur leur coeur la missive parfumée ? Enfinil n'est peut-être pas d'acte plus social que d'écrire une lettre. La correspondance épistolaire rapproche les familles dont les liens se sont distendus en raisons d'obligations professionnelles, du départ au régiment ou de la nécessité de quitter le foyer pour suivre des études à la ville. Ecrire rompt la solitude et apporte le réconfort.

Nul besoin de talent pour écrire une lettre, il faut surtout du coeur... A chacun son style. C'est avec leurs mots que douze artiste de la bande dessinée ont décliné le plaisir d'écrire. Douze timbres-poste qui sont comme un appel à lutter contre l'oubli...

Texte accompagnant une série de timbres-poste français ( valeur faciale 2,80 Frs ),
parce qu'écrire fait souvent plaisir

Le pain de Granive


Je suis un pain au levain nature
Sans une once de levure
L'eau, l'air, le feu m'ont façonné
Un peu aussi le boulanger...

Farine, eau sel et levain
Se mélangent dans le pétrin
Au bout d'une heure de levée
La pâte est prête à façonner

Alors doucement, je me coule
Et m'installe au fond des moules
Mais il faudra quatre heures encore
Pour que ma pâte ait tout son corps.

Le four est chaud, les briques blanches
Les pâtons sont enfournés
Pas le moment de lambiner
Il y a du pain sur la planche...

C'est alors un grand mystère
Sueur de l'eau, moiteur de l'air
Bien malin qui pourrait savoir
Ce qui se passe dans le noir

Et puis le four enfin ouvert
Voilà ce qu'on a découvert :
J'étais entré en toile blanche
Je sors tout en habit doré.

Quand tu mange ton pain
Pense à qui sema le grain,
Songe à la peine du Moissonneur,
Pense au Meunier, à son labeur
Et n'oublie pas le Boulanger...

Anonyme du Xxème siècle
Coup de coeur pour mon boulanger préféré

lundi 11 avril 2011

Terminus


Fréjus, Munich, Paris, Manchester, Chambéry...
Autant de noms, et j'en oublie, qui ont ponctués ma vie. « Les voyages forment la jeunesse et déforment les valises » a dit un philosophe-comique. Au fil des années, je m'aperçois comme c'est juste.

Et pourtant, j'ai vécu toutes les modes : depuis la malle en osier maintenue fermée par une sangle jusqu'à aujourd'hui ces sacs à roulettes. J'en ai porté de toutes les couleurs ( roses, noires , marron, vert kaki et même arc-en-ciel ), de toutes les tailles, de toutes les formes.
Avant le bagage était simple. De nos jours, il y a le bagage à main et, celui que je préfère, le bagage en soute. Avant, il était presque anonyme. De nos jours, Vigipirate exige qu'il soit identifié. Exemple : Monsieur machin, 10 rue Bidule, Saint-perpète à destination de Trifouillis-les-Oies, Hotel de la Colinne.

Malgré ces précautions, il y a encore de bonnes surprises, quelques anecdotes que je souhaite vous raconter.

Tenez, je me souviens de ce voyage d'ados. Ils partaient pour une semaine en Allemagne, hébergés chez l'habitant. Comme le veut la politesse, chacun avait emmené un petit cadeau. Soudain, le monde si bien rangé des valises se mit à murmurer, à tempester. Bref, ça n'allait pas fort.

    • Dites donc, d'où vient cette odeur ? Interroge une grosse valise usée. J'ai jamais rien sentit de pareil.

Sa petite voisine, légèrement intimidée, rougie. C'est son premier voyage, elle se sent un peu écrasée. Et l'odeur provient d'elle.
Il semble que les allemands raffolent de fromages français. Alors, Camille avait glissé dans sa valise un reblochon. Les heures et la chaleur aidant, celui-ci se laissait un peu aller. Beurkk !!!

Et ce départ vers Athènes, en juillet, lorsqu'on me signala la présence d'un étranger à bord. Il s'agissait d'un énorme sac à dos bourré à craquer. Ses voisines et voisins, plutôt taille de guêpe, pensez donc, ils n'avaient que des serviellets de plages et maillots de bains à transporter, s'étonnèrent. Les moqueries fusèrent.

    • Eh bien, t'as pris du poids cet hiver ! On t'a pas dit qu'on allait voir la mer ? hurla un sac noir.
    • Tes poignées, mon gars, c'est plus des poignées d'amour, renchérit une autre.
    • Ben ! Euh... ! Ben ! Bafouillait le pauvre sac à dos, ne sachant oùu se glisser pour être oublier.
    • Allez, vide ton sac ! ( Eclats de rires ) t'as quoi là-dedans ? Ne nous fait pas languir dit une valisette rose.

C'est ainsi qu'il expliquat avoir des vêtements de haute-montagne : vestes, pantalons, gants, bonnets, et tout le matériel nécessaire à l'ascension d'un huit mètres. Tous les autres en eurent froid dans le dos.
    • Mais, tu fais fausses route l'ami. Tu vas où ? questionna le premier.
    • Ben ! En Hymalaya ! C'est pas le bon vol ? Répondit-il
    • Hahaha, hahaha ! Il veut s'envoyer en l'air. Eh mec, t'es dans la soute d'un autocar de tourisme qui va voir la mer. Ça te dit quelque chose le mot plage.
    • Un peu, répod fièrement le sac de montagne, j'y suis allé l'année dernière.

Face à tout ce remue-ménage, l'intervention du chauffeur de car fut salutaire. Il fit le nécessaire pour que le clandestin retrouve la bonne destination.

Ce sont des souvenirs marrant. Malheureusement, une fois nous ne sommes pas passés loin d'un drame.

Des gamins, en attendant le départ, jouaient à cache-cache. L'appel avait eu lieu sur la place du rendez-vous. Lors du recomptage des enfants dans le car, les accompagnateurs s'aperçurent de l'absence du petit Jules.

    • Qui a vu Jules pour la dernière fois avant de monter ? demande le maître.
Ses copains expliquent qu'ils ont jouer à cache-cache. Les adultes ressortent et font le tour du véhicule. Le chauffeur entend taper de l'intérieur de la soute. Trop bien caché, Jules se retrouvait enfermé. Tous le monde s'est pris une ramonée. Je crois sans mentir que tous s'en souviennent encore.

Heureusement des cas comme ça, je n'en ai pas beaucoup en stock dans ma mémoire. Le plus souvent, ce sont des problèmes de bouteilles de shampoing qui fuient, de roulettes cassées, de bagages confondus...

N'empêche que j'ai la mélancolie qui me gagne. Toutes ces années à transporter des bagages de toutes sortes et savoir que, ce lundi 11 avril, c'est mon dernier voyage, j'ai le moral à zéro.

Des kilomètres et des kilomètres et voilà le TERMINUS, le mien. Tout le monde descend définitivement.

Tout à l'heure ma porte s'ouvrira. Des mains s'arracheront les sacs. Il y aura des rires, des embrassades... Et moi j'aurais de larmes car personne n'aura une pensée, un regard pour moi, la soute à bagages, lorsque la porte pour la dernière fois se refermera
Après, je crois que l'autocar part à la casse.


© Laurent SILVIN, lundi 11 avril 2011

lundi 21 mars 2011

Réservé


Seul, on peut l'être,
Au milieu d'une de fête.
Entre les beaux parleurs
Et les mauvais joueurs,
Il est parfois difficile
De trouver la vie facile.
Si l'on est timide,
Si le regard est humide,
On ne peut s'imaginer
Entrain de bouger,
Alors, on reste dans son coin.
Loin, très loin.
On n'ose pas paraître
Ni même se faire connaître.
Pourtant on aimerait bien
Avoir plusieurs copains,
Même s'ils se comptent
Sur les doigts de la main.
Mais on se raconte
Un tas de choses.
Des rêves en overdose !
Et l'on reste à la traîne.
Pourtant, il suffirait d'une étincelle,
D'une parole un peu belle,
D'un geste banal
Dans une vie anormale,
Pour qu'un sentiment explose
Et les jours soient roses.

D'un tout petit rien
Qui souvent fait du bien.

© Laurent SILVIN, mars 1989
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante

La vogue


Nous sommes venus pour dépenser.
Nous sommes venus pour s'amuser.
Ici, nous donnons un franc,
Un peu plus loin cinquante francs,
On nous assure gagnant !

A la vogue, nous jouons
De toutes les façons.
Que nous soyons petits ou grands,
Nous sommes tous des enfants.

Et puis, si la roue tourne,
Alors, on y retourne.
Même du tunnel aux horreurs,
Nous n'en avons pas peur.
L'essentiel, c'est le bonheur !

A la vogue, nous jouons
De toutes les façons.
Et nous passons contents
De merveilleux moments.

Mais si l'on repart penaud
Avec le coeur gros,
On pense en soi
« peut-être la prochaine fois,
Des peluches plein les bras ! »

Et la vogue, nous quittons
Detoutes les façons,
Laissant aux machines avides
le contenu de nos porte-monnaies vides.

© Laurent SILVIN, mai 1989
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante

Histoires


Quand une fleur rencontre une autre fleur,
Que se disent-elles ?
Des histoires de flore.

Quand un bonheur rencontre un autre bonheur,
Que se racontent-ils ?
Des histoires d'or.

Quand ma main rencontre ta main,
Que se disent-elles ?
Des histoires de caresses.

Quand un lendemain rencontre un autre lendemain,
Que se racontent-ils ?
Des histoires de promesses.

Quand mes yeux rencontrent tes yeux,
Que leurs disent-ils ?
Des histoires d'heureux.

Quand mon coeur rencontre ton coeur,
Que lui raconte-t-il ?
Des histoires de bonheur.

Quand nos amours se rencontrent,
Ils se racontent
Notre histoire d'amour.

© Laurent SILVIN, juin 1988
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante

Etre poète


J'aurais voulu être un poète,
Avoir des mots plein la tête,
Pouvoir chanter l'amour
Ou dire la vie de tous les jours,
pouvoir crier mes peurs
Ou narrer mes bonheurs.

Mais, je ne suis qu'un simple acteur
Sur cette terre pleine de chaleur,
Un pauvre homme parmi tant d'autres
Avec autant de fautes,
de problèmes, de peurs, de joies,
Avec ses mots, ses fêtes.

Je ne pourrais pas être poète
Et ne dirais pas ce que je crois !


© Laurent SILVIN, novembre 1988
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante

jeudi 17 mars 2011

Tu es mon fils !


Dans ma tête résonne encore cette voix familière, le téléphone continue ses bip-bips...
En quelques secondes, les images resurgissent d'un passé pas si lointain.

Que de choses vécues depuis cet été de 2003. Le soleil chauffait, les esprits aussi. Suite à un accident de moto, qui m'avait laissé sur le bas côté de la vie quelques semaines, j'étais en pleine reconstruction . Une lente sortie du chaos, grâce au soutien d'une équipe médicale et psychologique exceptionnelle.
Celle-ci me permit de retrouver le plaisir de marcher dans les bois, lire des romans et fréquenter mes amis. Je vous jure qu'après une telle épreuve vous n'en demandez pas plus.
Lorsque l'amour s'en mêle, cela devient à la fois plus agréable et plus compliqué. Il faut bien, un jour, présenter l'être aimé à la tribu familiale. Véritable drame en devenir !

15 août : jour de fête, jour de défaite... jour de fuite, plus rien.

Nouvelle période de vide mais la moto n'est pas en cause. Après le corps, voilà le coeur meurtri, plus de service médical pour vous soutenir. Vous n'êtes pas malade, simplement en rupture, éloigné... inexistant.
Vos lettres restent sans réponses, vos coups de téléphone tombent dans une boîte vocale... anonyme : « Bonjour vous êtes sur le répondeur téléphonique du numéro... etc. »

Aujourd'hui, c'est ce téléphone injoignable qui me joins. Et cette voix, que je n'ai pas oublié, s'est mise à me parler, à se confier.
Mon père franchissait enfin ce vide qui nous séparait.
Il me dit combien il avait pleuré depuis mon départ. Il s'excusa des mots prononcés ce 15 août 2003. Je l'avais choqué en lui présentant Vincent. Lui, le bûcheron, le fils de paysan, m'avoua n'avoir jamais compris ce fils que j'étais. D'ailleurs étais-je son fils lorsque je préférais les livres aux durs travaux manuels, un homme à une jeune fille comme compagnon de vie ?

Je compris soudain pourquoi mom père était si bourru lorsque j'étais enfant.

Il me dit que des larmes coulaient chaque soir de ses yeux depuis huit ans. Il m'avoua être, aujourd'hui, fier de moi, de ma réussite, de mes combats en faveur des minorités. Il m'avait découvert et compris en lisant tous les livres et articles que je publiais régulièrement.

Enfin, et c'est cela qui me boulversa le plus, ses bras n'en pouvant plus de ne serrer que du vide, il me demanda de lui donner le numéro de la porte de mon appartement. Il se trouvait au pied de mon immeuble.

A cet instant, il raccrocha son portable. Bip-bip.

J'ouvris la porte pour tomber dans ses bras.

© Laurent SILVIN, mercredi 9 mars 2011

lundi 14 mars 2011

Le chat et l'enfant


C'est l'histoire banale
D'un garçon et d'un animal.
Ils se sont croisés un soir,
Dans une banlieue, sur un trottoir.

Il était innocent, c'était un enfant.
Sa vie, c'était le jeu,
Sa façon d'être heureux ;
Mais il était seul.

Abondonné de tous,
Il rêvait d'une existence douce.
A son poil angora,
On devinait un chat.

Lequel des deux fit le premier pas.
Personne, jamais, ne le saura !
L'enfant lui offrit des caresses
Et le matou en retour sa paresse.

A chacun son regard, à chacun ses histoires,
L'un se mit à chanter pour célébrer l'amitié
L'autre à ronronner et ne plus le quitter.
Mais l'enfant était bien pauvre
Ne pouvant lui donner autre chose
Qu'un simple petit nom
Et un peu de «  Ronron ».


© Laurent SILVIN, avril 1990
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante

Slpeen


C'est une envie sans fin.
Une envie de tout et de rien !
C'est vouloir aimer
Mais ne pas savoir qui aimer.

C'est de nombreuses disputes,
Rarement de la joie,
De continuelles luttes
En toi.

C'est un tableau noir.
C'est ne pas savoir
Ou, ne pas vouloir,
Vivre en étant bien,
Sourire au lendemain.

C'est une salle de classe
Où tu t'ennuies,
Un professeur à la place
De ta petite amie.

C'est vouloir tout plaquer
Sans jamais oser.
C'est l'adolescence.
Adieu l'enfance !

© Laurent SILVIN, juin 1984
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante

samedi 5 mars 2011

Toi, l'écolier


Vers trois ans, tu quittes ta maman

Pour aller à la section enfantine.
C'est ta première année.
Il y en aura d'autres à passer.
Puis, tu deviens plus grand
Et tu manges à la cantine.

De ta petite école, c'est ta dernière année.
Première orientation !
A la grande école, tu commences à aimer ;
Tu n'es plus un petit garçon.

Que vas tu faire ?
Des études longues ou courtes ?
A toi de choisir de toutes manières,
A toi de faire ta route.

Voici le lycée et l'internat,
Tu prépares ton baccalauréat.
Sérieux toute la semaine,
Tu es amoureux le week-end.

Puis voilà les examens,
J'espère que tout se passera bien.
C'est l'année de tes dix-huit ans,
Tu seras peut-être étudiant
Ou encore lycéen
Ou bien...ce sera la fin.

© Laurent SILVIN, juin 1984
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante



Attirance


Deux mains qui se serrent,
Deux regards qui se cherchent,
Deux bouches qui s'embrassent,
Deux corps si proches
Et voilà l'attirance.

Deux coeurs qui battent
L'un pour l'autre,
Deux têtes qui se penchent,
Des mots qui s'échangent,
Des baisers qui s'évadent
Et voilà la romance.

Des instants de rêves,
Des couleurs de fêtes,
Des caresses si bonnes,
Des rires étouffés,
Des lèvres soudées,
C'est encore ça l'attirance
Mais c'est aussi la romance.

© Laurent SILVIN, janvier 1988
Extrait de « Pensées ordinaires par Moustache »
Éditions éphémères La Tocante

lundi 28 février 2011

Première rentrée !


Hier, j'ai choisi ma tenue pour aujourd'hui. Je ne voulais pas n'importe laquelle;
Ce matin, j'ai failli la changer mais il fallait déjeuner, alors, j'ai oublié ; J'ai avalé mon verre de lait et mangé quelques tartines puis j'ai enfilé mon gilet. Dehors, il fait frais !
A peine, mes pieds foulaient-ils le bitûme devant l'immeuble que j'ai attrapé ta main. Je voulais me rassurer et le trottoir est si proche de la route ; j'ai unpeu peur des voitures.
Heureusement, une gentille dame s'occupait de faire traverser au passage piétons. J'ai hésité, en face, il y avait beaucoup de monde, beaucoup de cris. J'ai serré un peu plus fort ta main.

Courageusement, nous sommes entrés dans la cour. Je me sentais un peu perdu. La foule ne m'attire pas en principe, mais je ne pouvais pas faire demi-tour. Une porte était ouverte, des affiches indiquaient la direction à prendre pour rejoindre la classe. J'ai eu l'impression de parcourir des kilomètres. Ma main un peu moite, un instant, a glissé de la tienne. Panique !
Tu m'as rattrapé par un doigt. Nous avons corrigé la position pendant les présentations d'usages avec la maitresse. J'ai eu une bonne impression. Je lâche, tu retiens, je serre, tu t'échappes ! Petit à petit, les mains se sont détendues, jusqu'à vraiment se quitter, se séparer, s'éloigner. La tienne est maintenant occupée avec un objet. Je cherche où mettre la mienne. Ne sachant pas, je te fais coucou avant de te voir disparaître derrière la porte. Voilà, la rentrée des classes est arrivée !

Rassure-toi ma petite fille, c'est aussi dur pour moi mais...
...à 11h30, ta petite menotte aura sa place dans la mienne.



© Laurent SILVIN, septembre 1998
Extrait de « Chefs d'oeuvres pour poubelle vide par Moustache »
Ouvrage imprimé en cinq exemplaires aux Éditions éphémères La Tocante


dimanche 13 février 2011

Lettre ouverte à ... ( Humour )


Monsieur le Maire,

Nous sommes une majorité silencieuse, certes !
Nous avons malgré tout des revendications à porter à votre connaissance. Monsieur Bruyant M. sera notre porte-parole.
Avec quelques amis, il a créé l'association APTE ( Agir Pour la Tranquilité des Entérrés).

Notre dernière demeure est située sur le terrain communal ZA 148, au lieu-dit « le coin tranquillle ». Ce nom lui a convenu jusqu'en 1990, année choisie par votre prédécesseur pour lancer les travaux de construction de l'autoroute ; désormais finie et très fréquentée. Cette voie de circulation passe à proximité de notre «  boulevard des allongés ».
notre éternelle quiétude n'est plus ce qu'elle fut ; nous sommes nombreux à le regretter !

Nous vous demandons d'intercéder en notrte faveur auprès de la société d'autoroute afin qu'elle procède au plus vite aux aménagements suivants :
    • mise en place d'un mur anti-bruit, nos pauvres oreilles ne supportent plus.
    • Réfection du revêtement de la chaussée, il existe des matériaux absorbant les ondes. Nos vieux os s'entrechoquent !
    • Réalisation d'un drain pour évaquer les eaux pluviales ( parfois salées, en hiver, beurk ! ), nous soffront de noyade.

Nous espérons que vous répondrez très vite à nos demandes, nous sommes certains que vous êtes conscient des problèmes et saurez les résoudre. Il en va de votre futur confort !

Recevez, Monsieur le Maire, l'expression de nos salutations distinguées.

Pour vos administrés disparus,
Association APTE,
Monsieur Bruyant M.

Un soir à Amphion (Haute-Savoie)
© Laurent SILVIN, août 1997
Extrait de « Chefs d'oeuvres pour poubelle vide par Moustache »
Ouvrage imprimé en cinq exemplaires aux Éditions éphémères La Tocante

Cycle Seefeld in Tirol ( Austria )


Smoking noir

Bonjour pour Toi, c'est bonsoir
Le jour pour Toi, c'est le soir.
Ton univers, c'est la fumée
C'est des jeton s lancés.
Tu passes ton temps à répéter
Répéter des chiffres qu'on t'a annoncé.
Ton regard ne croise que celui du chef,
Tu n'obéis d'ailleurs qu'à ton chef.
Tu règle ta vie en fonction des pauses
Peux-tu penser à autre chose ?
C'est difficile et tule sais bien
Ton travail à jamais te tient.
T'es mignon dans ton SMOKING NOIR
T'as du pognon et tu le fais voir.
Pour toi, la pauvreté est un vain mot
Tu gagne à chaque fois le gros lot.
Tu considère l'éxistence comme un jeu,
Et le mot aisance est ton Dieu.
Tu parles bien et tu es poli,
En plusieurs langues, Merci
Est le mot que tu sais dire.
Ton visage n'est que sourire
Commercial peut-être
Il faut vendre ton être.
Hypocrite, sûrement
Mais tu ne l'avoue pas, évidemment.
Tu fais ça naturellement
Après l'école, au bout d'un an.
Jamais tu ne perds la boule
Et pourtant dans le cylindre, elle roule.
Tu n'as qu'un espoir ,
Voir la boite pleine le soir...

Et des pourboirs recevoir.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 22 septembre 1990


Le cylindre

Trente-sept numéros
Dix-huit rouges, dix-huit noirs,
Un seul vert, le zéro
un seul dieu, Hazard.
Deux sens de rotation
Mais une seule fonction
Sortir le bon chiffre
D'entre tes griffes.
Deux mains pour t'entrainer
Des dizaines d'yeux pour t'observer ;
Une seule boule
Qui en toi roule
Et sur toute les roulettes
Ta place, c'est la tête.



© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 2 octobre 1990


L'annonce

De simples mots lancés comme cela
dans la fumée et le brouhaha.
De simples nombres criés
Et par les croupiers répétés.
Tu n'as qu'un seul corps, des jetons.
Annonce es ton unique nom.
Personnelle, unique ou courante
Le client t'espère gagnante.
Tu ne vis qu'une fois
Et donne à chacun l'émoi.
Tu es volage, de passage
Mais très rarement sage.
Et si par bonheur tu as décidé
que tels joueurs devaient gagner
Alors te voilà multipliée.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 11 octobre 1990


La pause

Des dizaines de jetons sur le tapis.
Le rateau qui glisse sans bruit,
On tape sur ton épaule
Tu vas quitter ton rôle.
Tu retournes le coussin
« Quinze minutes, très bien ! »

te voilà, comme plusieurs
A la pause du quart d'heure.
Tu ne peux pas oublier
Même devans l'écran TV
Qu'en bas ça joue
Des numéros de partout.
Assis dans le fauteuil, tu reposes
Tu profites au mieux de ta pause
Surtout ne pas parler
Pour ne pas déranger ;
tes collègues sont comme toi
Ils ont besoin de ça.

Sur l'horloge, le signal
Une minute banale ;
Tu te lève, t'étires
Replaces ton sourire
Tape, épaule, salle
A nouveau tu t'installes.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 22 septembre 1990


La flambe

Dix, non cent mille shillings
Joués comme ça au feeling.
Des jetons rouges et plaques blanches
Qui habillent le tapis « en dimanche »
Et ce pour le plaisir d'un seul
Cet homme à la grande geule.
On te surnommait le flambeur fou
L'homme cousu de sous.
Et c'est vrai que tu as flambé
Un peu pour gagné...
Beaucoup pour frimer.
Il suffisait pour cela
de voir ton sourire narquois.
Combien as-tu gagné dans la soirée
Sur ce que tu as dépensé ?
Rien! Et on le savait bien.
De tes deux millions, on en fait notre festin.
Et malgré ta générosité
La chance n'étais pas à tes côtés.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 8 octobre 1990


Pourboire

Tu n'as que la valeur de la mise
Mais tu es une chose exquise.
Tu es recherché, adulé
Mais à chaque fois remercié.
Si le client parfois t'oublie
Alors le croupier lui sourit :
« Trois mille cinq cents
Pour un plein par cent »,
Le geste suit naturellement.
Et tu chois délicatement
Dans cette boite métallique.
Tu n'es pas obligatoire
Et à ton origine, accessoire.
T'étais le signe de reconnaissance,
Tu étais lié à la chance.
Aujourd'hui, mon jeune ami
Tout ceci es bien proscrit
Et si du gain tu ne fais pas parti ;
L'employé presque naturellement le déduit.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 1er octobre 1990


Ein bier, bitte !!

Tu coules à flots
Dans nos verres
Tu es ce qu'il y a de plus beau
Pour changer d'air
On te bois avec passion
Et te sert avec pression.
On t'appelle « mousse »
Tu sais être rousse.
Tu glisses dans notre gorge
Et parfois tu te nommes Georges.
Tu es une boisson amoureuse
3615 la bière heureuse.
Et sache que nous t'aimons
Et tant pis pour le ventre rond.


( En rentrant du rMonroe's Bar )
© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 26 septembre 1990

Tous ces textes sont extrait de « Chefs d'oeuvres pour poubelle vide par Moustache »
Ouvrage imprimé en cinq exemplaires aux Éditions éphémères La Tocante