lundi 28 février 2011

Première rentrée !


Hier, j'ai choisi ma tenue pour aujourd'hui. Je ne voulais pas n'importe laquelle;
Ce matin, j'ai failli la changer mais il fallait déjeuner, alors, j'ai oublié ; J'ai avalé mon verre de lait et mangé quelques tartines puis j'ai enfilé mon gilet. Dehors, il fait frais !
A peine, mes pieds foulaient-ils le bitûme devant l'immeuble que j'ai attrapé ta main. Je voulais me rassurer et le trottoir est si proche de la route ; j'ai unpeu peur des voitures.
Heureusement, une gentille dame s'occupait de faire traverser au passage piétons. J'ai hésité, en face, il y avait beaucoup de monde, beaucoup de cris. J'ai serré un peu plus fort ta main.

Courageusement, nous sommes entrés dans la cour. Je me sentais un peu perdu. La foule ne m'attire pas en principe, mais je ne pouvais pas faire demi-tour. Une porte était ouverte, des affiches indiquaient la direction à prendre pour rejoindre la classe. J'ai eu l'impression de parcourir des kilomètres. Ma main un peu moite, un instant, a glissé de la tienne. Panique !
Tu m'as rattrapé par un doigt. Nous avons corrigé la position pendant les présentations d'usages avec la maitresse. J'ai eu une bonne impression. Je lâche, tu retiens, je serre, tu t'échappes ! Petit à petit, les mains se sont détendues, jusqu'à vraiment se quitter, se séparer, s'éloigner. La tienne est maintenant occupée avec un objet. Je cherche où mettre la mienne. Ne sachant pas, je te fais coucou avant de te voir disparaître derrière la porte. Voilà, la rentrée des classes est arrivée !

Rassure-toi ma petite fille, c'est aussi dur pour moi mais...
...à 11h30, ta petite menotte aura sa place dans la mienne.



© Laurent SILVIN, septembre 1998
Extrait de « Chefs d'oeuvres pour poubelle vide par Moustache »
Ouvrage imprimé en cinq exemplaires aux Éditions éphémères La Tocante


dimanche 13 février 2011

Lettre ouverte à ... ( Humour )


Monsieur le Maire,

Nous sommes une majorité silencieuse, certes !
Nous avons malgré tout des revendications à porter à votre connaissance. Monsieur Bruyant M. sera notre porte-parole.
Avec quelques amis, il a créé l'association APTE ( Agir Pour la Tranquilité des Entérrés).

Notre dernière demeure est située sur le terrain communal ZA 148, au lieu-dit « le coin tranquillle ». Ce nom lui a convenu jusqu'en 1990, année choisie par votre prédécesseur pour lancer les travaux de construction de l'autoroute ; désormais finie et très fréquentée. Cette voie de circulation passe à proximité de notre «  boulevard des allongés ».
notre éternelle quiétude n'est plus ce qu'elle fut ; nous sommes nombreux à le regretter !

Nous vous demandons d'intercéder en notrte faveur auprès de la société d'autoroute afin qu'elle procède au plus vite aux aménagements suivants :
    • mise en place d'un mur anti-bruit, nos pauvres oreilles ne supportent plus.
    • Réfection du revêtement de la chaussée, il existe des matériaux absorbant les ondes. Nos vieux os s'entrechoquent !
    • Réalisation d'un drain pour évaquer les eaux pluviales ( parfois salées, en hiver, beurk ! ), nous soffront de noyade.

Nous espérons que vous répondrez très vite à nos demandes, nous sommes certains que vous êtes conscient des problèmes et saurez les résoudre. Il en va de votre futur confort !

Recevez, Monsieur le Maire, l'expression de nos salutations distinguées.

Pour vos administrés disparus,
Association APTE,
Monsieur Bruyant M.

Un soir à Amphion (Haute-Savoie)
© Laurent SILVIN, août 1997
Extrait de « Chefs d'oeuvres pour poubelle vide par Moustache »
Ouvrage imprimé en cinq exemplaires aux Éditions éphémères La Tocante

Cycle Seefeld in Tirol ( Austria )


Smoking noir

Bonjour pour Toi, c'est bonsoir
Le jour pour Toi, c'est le soir.
Ton univers, c'est la fumée
C'est des jeton s lancés.
Tu passes ton temps à répéter
Répéter des chiffres qu'on t'a annoncé.
Ton regard ne croise que celui du chef,
Tu n'obéis d'ailleurs qu'à ton chef.
Tu règle ta vie en fonction des pauses
Peux-tu penser à autre chose ?
C'est difficile et tule sais bien
Ton travail à jamais te tient.
T'es mignon dans ton SMOKING NOIR
T'as du pognon et tu le fais voir.
Pour toi, la pauvreté est un vain mot
Tu gagne à chaque fois le gros lot.
Tu considère l'éxistence comme un jeu,
Et le mot aisance est ton Dieu.
Tu parles bien et tu es poli,
En plusieurs langues, Merci
Est le mot que tu sais dire.
Ton visage n'est que sourire
Commercial peut-être
Il faut vendre ton être.
Hypocrite, sûrement
Mais tu ne l'avoue pas, évidemment.
Tu fais ça naturellement
Après l'école, au bout d'un an.
Jamais tu ne perds la boule
Et pourtant dans le cylindre, elle roule.
Tu n'as qu'un espoir ,
Voir la boite pleine le soir...

Et des pourboirs recevoir.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 22 septembre 1990


Le cylindre

Trente-sept numéros
Dix-huit rouges, dix-huit noirs,
Un seul vert, le zéro
un seul dieu, Hazard.
Deux sens de rotation
Mais une seule fonction
Sortir le bon chiffre
D'entre tes griffes.
Deux mains pour t'entrainer
Des dizaines d'yeux pour t'observer ;
Une seule boule
Qui en toi roule
Et sur toute les roulettes
Ta place, c'est la tête.



© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 2 octobre 1990


L'annonce

De simples mots lancés comme cela
dans la fumée et le brouhaha.
De simples nombres criés
Et par les croupiers répétés.
Tu n'as qu'un seul corps, des jetons.
Annonce es ton unique nom.
Personnelle, unique ou courante
Le client t'espère gagnante.
Tu ne vis qu'une fois
Et donne à chacun l'émoi.
Tu es volage, de passage
Mais très rarement sage.
Et si par bonheur tu as décidé
que tels joueurs devaient gagner
Alors te voilà multipliée.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 11 octobre 1990


La pause

Des dizaines de jetons sur le tapis.
Le rateau qui glisse sans bruit,
On tape sur ton épaule
Tu vas quitter ton rôle.
Tu retournes le coussin
« Quinze minutes, très bien ! »

te voilà, comme plusieurs
A la pause du quart d'heure.
Tu ne peux pas oublier
Même devans l'écran TV
Qu'en bas ça joue
Des numéros de partout.
Assis dans le fauteuil, tu reposes
Tu profites au mieux de ta pause
Surtout ne pas parler
Pour ne pas déranger ;
tes collègues sont comme toi
Ils ont besoin de ça.

Sur l'horloge, le signal
Une minute banale ;
Tu te lève, t'étires
Replaces ton sourire
Tape, épaule, salle
A nouveau tu t'installes.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 22 septembre 1990


La flambe

Dix, non cent mille shillings
Joués comme ça au feeling.
Des jetons rouges et plaques blanches
Qui habillent le tapis « en dimanche »
Et ce pour le plaisir d'un seul
Cet homme à la grande geule.
On te surnommait le flambeur fou
L'homme cousu de sous.
Et c'est vrai que tu as flambé
Un peu pour gagné...
Beaucoup pour frimer.
Il suffisait pour cela
de voir ton sourire narquois.
Combien as-tu gagné dans la soirée
Sur ce que tu as dépensé ?
Rien! Et on le savait bien.
De tes deux millions, on en fait notre festin.
Et malgré ta générosité
La chance n'étais pas à tes côtés.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 8 octobre 1990


Pourboire

Tu n'as que la valeur de la mise
Mais tu es une chose exquise.
Tu es recherché, adulé
Mais à chaque fois remercié.
Si le client parfois t'oublie
Alors le croupier lui sourit :
« Trois mille cinq cents
Pour un plein par cent »,
Le geste suit naturellement.
Et tu chois délicatement
Dans cette boite métallique.
Tu n'es pas obligatoire
Et à ton origine, accessoire.
T'étais le signe de reconnaissance,
Tu étais lié à la chance.
Aujourd'hui, mon jeune ami
Tout ceci es bien proscrit
Et si du gain tu ne fais pas parti ;
L'employé presque naturellement le déduit.


© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 1er octobre 1990


Ein bier, bitte !!

Tu coules à flots
Dans nos verres
Tu es ce qu'il y a de plus beau
Pour changer d'air
On te bois avec passion
Et te sert avec pression.
On t'appelle « mousse »
Tu sais être rousse.
Tu glisses dans notre gorge
Et parfois tu te nommes Georges.
Tu es une boisson amoureuse
3615 la bière heureuse.
Et sache que nous t'aimons
Et tant pis pour le ventre rond.


( En rentrant du rMonroe's Bar )
© Laurent SILVIN, Seefeld ( Autriche ) 26 septembre 1990

Tous ces textes sont extrait de « Chefs d'oeuvres pour poubelle vide par Moustache »
Ouvrage imprimé en cinq exemplaires aux Éditions éphémères La Tocante

jeudi 3 février 2011

Les chevaux


Qui galope par monts et par vaux ?
Ce sont les chevaux,
Buvant au ruisseau,
Ils regardent d'un oeil gros,
Les petits oiseaux.

Ils sont blancs comme les mourons,
Aussi noirs que les hérissons,
Ou marrons comme les chatons,
Ils observent les papillons,
Qui eux sont très blonds.
Dans l'ancienne gendarmerie,
Qui est maintenant l'écurie,
Quand il hennit,
On pense qu'il rit,
Alors on rit nous aussi.
Quand c'est le printemps,
Ils labourent les champs,
Mais, ils ne sont pas contents,
Lorsqu'à la foire on les vend,
Pour des centaines de francs.
Dans les concours, ils font des sauts,
Aux champs, ils nous aident dans nos travaux,
j'aime bien les chevaux,
Car ils sont beaux,
Et nous font faire des tours par monts et par vaux.

© Laurent SILVIN, octobre1978
Extrait de « Chefs d'oeuvres pour poubelle vide par Moustache »
Ouvrage imprimé en cinq exemplaires aux Éditions éphémères La Tocante

mercredi 2 février 2011

Papa, fumeur de Gitanes


Je ne suis pourtant qu'un petit bout,
Un petit bout de Toi et de Bambou,
Mais par Toi, je me sens différent
Avant l'heure, je suis déjà grand.

Je te voyais toujours mal rasé,
Je t'apercevais parfois dans ma télé,
Toi, que tous nommait Gainsbarre
Je ne te rejoindrai plus dans ton plumard.

Je n'ai pu être critique de tes peintures
Depuis longtemps t'avais fait censure,
Mais constamment j'écouterai tes chansons
Toi dont la musique et les mots étaient passion.

Un jour, tu brulas un billet de cinq cent balles.
Une flamme qui s'inscrira dans les annales.
Alors on te prit pour un provocateur,
Un alcoolique, un fumeur, un baiseur.

Malgré toutes ces injures, tu as su t'élever
Au dessus des roulures qui t'ont rejeté
Et d'années en années sans cesse tu créas
Des chefs d'oeuvres que l'on imitera.

Moi qui suis le fruit d'une copulation
D'une déesse et d'un dragon
Par ces mots, j'ai voulu te dire
Qu'au delà de ton départ, je t'admire.

« Lulu » ton fils.




Suite à la mort de Serge Gainsbourg, le 2 mars 1991 à Paris
© Laurent SILVIN, mars 1991